Les pressoirs
Les bouilleurs de cru
Les bouilleurs de cru ambulants mordelais, successivement Jean-Pierre Huet (habitant aux Géraults), Constant Bigot (résidant au bourg), Pierre Galerne (originaire du Vert-Bois), puis Alphonse Saint-Ouen, s’installent dans des endroits précis autorisés par les douanes et dénommés ateliers publics.
On en dénombre deux à Mordelles dans les années 30 : le premier est situé à l’angle de l'allée de la scierie [2] et de la rue du docteur Dordain et le second au lieu-dit la Chapelle[3].
La veille de la distillation, les producteurs souhaitant obtenir de la goutte doivent aller chercher un acquit attestant le paiement d’une taxe. Cette démarche se fait chez un auxiliaire de l’administration fiscale assermenté et chargé de percevoir les impôts indirects[4].
Le lendemain matin, les fermiers apportent leur barrique de cidre ou de lie[5] ainsi que le bois destiné au fonctionnement de la chaudière. Cette dernière est d'ailleurs toujours installée près d’un puits car elle a besoin d'eau pour fonctionner.
En fin d’après-midi, ils reviennent chercher leur eau-de-vie[6], munis d’un nouvel acquit leur donnant le droit de circuler en possession de goutte.
A l’époque, la goutte est très appréciée, après ou dans le café.
Le commerce des pommes "à couteau" et à cidre
Les pommes "à couteau" sont les pommes destinées à la consommation. C'est cependant le commerce des pommes à cidre qui est le plus important.
Henri Lelardoux fils raconte dans son livre "Histoires d’Henri… Histoire d’en rire !" l’effervescence de la période de récolte des pommes qui démarre à partir de septembre. Il précise notamment que "les pommes douces et douces amères étaient destinées à la fabrication du cidre, alors que les pommes aigres blanches étaient prisées pour les compotes et marmelades". Cliquez sur l'extrait ci-après pour agrandir et lire le texte d'Henri Lelardoux.
Avant 1900, son grand-père Pierre Beucher crée un négoce de pommes et de cidre en gros, activité reprise par son père Henri Lelardoux jusqu’en 1950 environ.
En 1900, 3 autres commerces de cidre et/ou de pommes en gros sont présents sur la commune : ceux de Pierre Hubert[7], de Joseph Jubault et d’Alexandre Paty.
Les cidreries
A la fin du XIXe siècle, on note la présence de deux cidreries à Mordelles : les cidreries Hubert-Baudais[8] et Baudais-Le Petit installées respectivement rue du frère Émilien et dans la cour sise au numéro 1 de la rue de Lorient. Elles fonctionneront jusque dans les années 60, période à partir de laquelle la production de cidre mais aussi son image de marque régressent fortement au plan national au profit du vin et de la bière.
A la fin du XIXe siècle, les propriétaires des cidreries possédent de nombreuses prairies plantées de pommiers et assurent ainsi leur production.
Lors des bonnes récoltes, ils produisent 180 barriques de cidre, soit près de 40 000 l[9].
Le cidre est vendu dans les cafés rennais. Son transport s’effectue dans de grosses charrettes ornées de lampions car le cidre doit être livré avant 6 heures du matin pour un trajet qui peut durer 4 h[10].
Le cidre peut être conservé de deux manières : en tonneau ou en bouteille. A la campagne, on préfère le stocker dans des tonneaux car il n'est pas gazeux, il est plus "plat", il évolue et prend du goût. On le tire à la clé[11].
La qualité du cidre mordelais
Les agriculteurs et industriels mordelais sont régulièrement récompensés pour la qualité de leur cidre aussi bien au niveau départemental que cantonal. En voici quelques exemples.
En 1933, la commune se distingue en effet lors du concours national des cidres qui a lieu à Rennes.
Pierre Hubert (cidrerie Hubert-Baudais)y reçoit la médaille d’or tandis qu'Henri Lelardoux se voit gratifier de celle de bronze du meilleur cidre en bouteilles dans la catégorie industriels.
Dans la catégorie agriculteurs, Alexis Georges, employé à la ferme du château de la Haichois, obtient la médaille d’or.
En 1934, lors du comice agricole du canton de Mordelles, le prix du meilleur cidre bouché dans la catégorie récoltants est attribué à Pierre Hubert de la cidrerie Hubert-Baudais située rue du Frère Émilien. Le second prix revient à Constant Lebreton d’Hatillé et le troisième à Louis Lehagre de la Basse-Grillonnais.
Le concours national de pomologie à Pontivy en 1936 récompense à nouveau Louis Lehagre qui reçoit le prix du Président de la République pour le meilleur cidre en fûts dans la catégorie agriculteurs.
Le pressoir de Sermon
C'est le pressoir utilisé autrefois à la ferme de Sermon qui figure actuellement dans le parc du Pressoir, près de la maison de retraite. Il a au moins 100 ans.
C'est un modèle avec système à vis, sans cage, dont la pression est assurée par un système à clavette ou à chien.
Les fruits broyés, des pommes de différentes variétés (Lèche-Pépin, Doux-Amer, Bédange Rouge etc.), sont chargés dans la carrée (la maie) du pressoir à l'aide d'une pelle. On dispose une couche de 20 cm, en alternance avec une couche de paille. On installe ainsi 3 ou 4 couches successives pour procéder ensuite au pressurage.
La ferme de Sermon est, elle aussi, réputée pour faire à l'époque un excellent cidre.
Voici une ancienne photo de ce pressoir fournie par Stéphane Gautier :
Sources
Archives A.M. Nédellec, Ecomusée du Pays de Rennes, Livre d'Henri Lelardoux "Histoires d'Henri...Histoire d'en rire!", Mordelles Mag' mars/avril 2016 (la page d'histoire), R. Birot, S. Gautier.
Notes et Références
- ↑ Source : écomusée du Pays de Rennes (extrait du texte du montage audiovisuel sur la fabrication du cidre).
- ↑ En référence à l’ancienne scierie Persais.
- ↑ Près du porche du Pâtis.
- ↑ Impôts indirects : impôts existant avant la création de la TVA.
- ↑ Lie : dépôt du cidre.
- ↑ Eau de vie : pas plus de 1000 degrés d’alcool autorisés.
- ↑ Cidrerie Hubert-Baudais.
- ↑ Cidrerie Hubert-Baudais : reprise par Albert Hubert dans les années 30, puis par Eugène Gilles.
- ↑ Une barrique = 220 litres.
- ↑ Propos recueillis auprès des aînés mordelais.
- ↑ Source : écomusée du Pays de Rennes (extrait du texte du montage audiovisuel sur la fabrication du cidre)