Jean-Louis Leblay
Sommaire
Menuisier mordelais et soldat dans l'infanterie
C’est en 1916 ou en 1917 que le Mordelais Jean-Louis Leblay se fait prendre en photo avec des camarades sapeurs du 76e RIT de Vitré.
Le menuisier a rejoint ce régiment d’infanterie territoriale en février 1915 dans le secteur de Langemarck, au nord d’Ypres, dans les Flandres belges.
Sans doute a-t-il été alors affecté à la section de sapeurs en raison de ses compétences professionnelles.
Recto d'une carte postale : Jean-Louis Leblay, avec d’autres sapeurs du 76e RIT de Vitré. Il est assis au premier rang, le second en partant de la gauche. Les autres territoriaux n’ont pu être identifiés. Deux d’entre eux ont été décorés de la croix de guerre.
Originaire de Montfort-sur-Meu, Jean-Louis Joseph Leblay a épousé le 24 novembre 1903 une Mordelaise, Jeanne-Marie Perrinne Bigot[1]. Le nouveau marié reprend alors l’entreprise de menuiserie tandis que sa femme est débitante [2], ainsi qu’en attestent plusieurs cartes postales du début du XXe siècle.
Envoyé sur le front
On ne sait que peu de choses sur la vie sur le front de Jean-Louis Leblay : il ne semble pas que les lettres qu’il a dû envoyer à sa famille aient été conservées, à l’exception d’une carte à la famille Bigot.
De même, on n’a aucune trace de la rédaction d’un carnet tenu au jour le jour, comparable à ceux d’autres territoriaux de ce régiment, tel Amand Fontaine, l’instituteur de Brains-sur-Vilaine, ou Adrien Guy, clerc de notaire à Liffré [3] .
Il est cependant probable que le menuisier de Mordelles ait, comme ses camarades, assisté à la première attaque aux gaz lancée par les Allemands sur le front occidental, face à Langemarck, le 22 avril 1915. Si le 76e RIT est alors en seconde ligne, dans le secteur de Boesinghe, le repli rapide des soldats des 73e et 74e RIT [4] qui ont pu échapper aux nappes de chlore, place de fait les territoriaux de Vitré aux avant-postes : ils vont en effet devoir, dans les jours suivants, mener des combats très durs et subir de nouvelles émissions de gaz.
Avec d'autres Mordelais
Jean-Louis Leblay n’est d’ailleurs pas le seul Mordelais à avoir assisté à ces tragiques événements.
Certes, la plupart des anciens conscrits de sa classe encore vivants au moment la mobilisation – cinq au moins sont morts entre leur passage devant le conseil de révision et l’entrée en guerre – rejoignent dans les jours et les semaines qui suivent le 1er août 1914, le 75e régiment d’infanterie territoriale de Rennes, qui rassemble une bonne part des mobilisables du bureau de recrutement de Rennes nés entre 1875 et 1879, âgés donc de 35 à 39 ans.
Très rapidement cependant, un certain nombre d’entre eux sont versés dans d’autres unités, en partie pour combler les pertes de l’été et de l’automne 1914.
Né à la Haichois où ses parents tiennent une ferme appartenant aux châtelains, Pierre Jumel fait partie de ceux qui ont déjà un long passé militaire : il a en effet servi comme engagé volontaire, dans les zouaves et l’infanterie coloniale en Algérie, au Sahara ou au Tonkin de 1896 à 1912, passe ainsi du 75e RIT au service automobile d’un régiment d’artillerie, les séquelles d’une fracture de la jambe ne lui permettant plus de servir comme fantassin, même dans la territoriale.
Jean-Marie Rocheron doit lui aussi quitter le régiment rennais pour le 56e RI, un régiment d’infanterie d’active, puis un régiment d’artillerie de campagne, le 48e RAC, dont le dépôt est à Dijon.
Mais plusieurs Mordelais, ayant dû passer du 75e RIT de Rennes au 76e RIT, ont probablement côtoyé Leblay sur le front des Flandres.
Ainsi Marie-Joseph Hunot, né au Pressoir, qui rejoint le régiment de Vitré le 22 mai 1915, avant d’être évacué suite à une blessure par éclat d’obus en août de la même année, ou encore Pierre Desnoës, né au Haut-Plessix, qui arrive quant à lui sur le front en octobre 1915.
Ils n’ont cependant pu y rencontrer Pierre-Marie Girandière, né à Vincé : passé au 76e territorial dès le 31 septembre 1914, il meurt le 18 décembre 1914, atteint par la typhoïde qui cause de nombreux décès dans les rangs des militaires fin 1914-début 1915.
Démobilisé début 1919
Jean-Louis Leblay rentre à Mordelles au début de l’année 1919 : il a été en effet démobilisé, comme de nombreux territoriaux, dès la fin du mois de janvier, alors que les plus jeunes classes de combattants ne regagneront leurs foyers qu’en septembre.
Il avait, en 1917, quitté le 76e RIT, bientôt dissous, et rejoint une compagnie du 1er régiment du génie au sein duquel il finit la guerre sans la moindre blessure.
Il retrouve son atelier de menuiserie qu’il tiendra jusqu’en 1939 au moins.
On le voit : une simple photographie peut nous apprendre beaucoup sur la vie des poilus mordelais entre 1914 et 1918.
Sources des photos et des textes
archives A.M. Nédellec, collection privée, Y. Lagadec, exposition réalisée dans le cadre du centenaire de la Grande Guerre 14-18.
Notes et Références
- ↑ Veuve de Julien Trinquart décédé le 19 janvier 1902 et exerçant lui aussi le métier de menuisier dans un atelier situé place des Muletiers.
- ↑ café et tabac, place de l’Eglise à Mordelles.
- ↑ Yann LAGADEC, « “Si jamais tu lis ces lignes, maudis la guerre…”. Amand Fontaine, un instituteur breton dans la première bataille d’Ypres avec le 76e RIT de Vitré (octobre-novembre 1914) », Bulletin et mémoires de la Société archéologique et historique d’Ille-et-Vilaine, 2012, p. 287-315.
- ↑ les régiments de Guingamp et Saint-Brieuc.
- ↑ Photo colorisée