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Recherches archéologiques

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Mordelles, il y a plus de 2000 ans
Fanum 01s.jpg
Fanum 02s.jpg
Fanum gallo-romain
Région Drapeau-breton.jpg Bretagne
Département Armoiries-35.jpg Ille-et-Vilaine
Commune Armoiries-mordelles.jpg Mordelles
Objet Fouilles archéologiques
Période L’Antiquité et le début du Moyen Âge
Références
Rédacteur(s) M. Scellier, M. Levan,
F. Le Boulanger, I. Birot
Archives Inrap




Mordelles à l'époque gallo-romaine
Information 02.jpg

Il y a plus de 2000 ans, au cours de l’époque gallo-romaine, les terres du Val de Sermon étaient déjà occupées. Grâce au travail effectué par une équipe de l’Inrap[1], une partie de l'histoire de Mordelles est ainsi mise au jour sur le site de Sermon.
Deux périodes y sont représentées : l’Antiquité, avec des vestiges datés entre la fin du Ier siècle avant notre ère jusqu’au milieu du IIe siècle de notre ère et le début du Moyen Âge (du milieu du VIe siècle jusqu’au IXe siècle).


La phase de diagnostic

Fouilles INRAP

[2]Les travaux d’aménagement d’une zone entraînent inévitablement la destruction des vestiges que peut contenir un sous-sol. Pour éviter qu’avec eux ne soit enseveli tout un pan de notre histoire, la mission de l’Inrap est d’assurer la sauvegarde, par l’étude, de ces vestiges. La première phase de l’archéologie préventive est de détecter la présence, ou non, de témoignages d’occupation humaine : c’est la phase de diagnostic qui a été réalisée à Sermon en 2013.


A l’aide de pelles mécaniques, un maillage sous forme de tranchées en quinconce a alors été effectué sur l’ensemble de la zone à construire. A ce stade, pour les novices que nous sommes, il apparaissait que les tranchées étaient peu profondes, ce qui pouvait nous laisser dubitatifs sur la capacité des intervenants à déceler quoi que ce soit.

Fouilles INRAP à Sermon

Dans les faits, la couche de terre végétale retirée sur une épaisseur, variant de 60 à 1m20 pour le territoire de Sermon, mit à nu le schiste, lequel, grâce à différentes nuances de teinte et de texture, permit de détecter à certains endroits des concentrations de vestiges. Nous pouvions également penser que les pelles mécaniques saccageraient davantage qu’elles ne sauvegarderaient les traces. Eh bien, non ! Un archéologue se place devant le godet lisse de la pelle pour guider le conducteur. La précision est de l’ordre de quelques millimètres.

Cette étape déterminante a été réalisée par Laurent Aubry, membre de l’Inrap ; elle a permis de déterminer la nature des vestiges et de les dater. Le rapport de diagnostic alors remis à la DRAC[3] mit en évidence des vestiges datant à la fois des périodes antique et du Moyen Âge.

Fouilles INRAP à Sermon Fouilles INRAP à Sermon

Au regard de ces informations, les services de l’Etat décidèrent de faire réaliser une fouille sur la partie contenant les vestiges les plus importants, soit pour Sermon une superficie de 4 hectares divisée en 2 zones de tailles très inégales.

Fouilles INRAP à Sermon

Il est à noter que ces recherches archéologiques préventives s’inscrivent dans le cadre juridique d’une loi datant de 2001. Le diagnostic est imposé en amont des chantiers mais n’arrête pas ces derniers, il est intégré dans le planning des travaux d’aménagement. La fouille, quant à elle, n’est pas systématique ; elle dépend de l’importance des découvertes faites lors du diagnostic. Sa mise en œuvre est du ressort de l’Etat.

Fouilles INRAP à Sermon Fouilles INRAP à Sermon
Légendes des photos du diagnostic :

Photo 1 :vol au-dessus de la fouille archéologique du val Sermon qui s'étend sur une surface de 4 hectares.
Photo 2 : Exemple de diagnostic archéologique réalisé par l'Inrap sur le tracé d'une future autoroute. Les tranchées, réalisée à la pelle mécanique, permettent de sonder 5 à 10 % du terrain.
Photo 3 : le travail à la pelle mécanique
Photo 4 : Le diagnostic consiste en la réalisation de tranchées à intervalles réguliers afin de détecter la présence de vestiges archéologiques, de les dater et de décider de leur fouille éventuelle. Il est réalisé le plus souvent au moyen d'une pelle mécanique guidée par un archéologue. Le diagnostic au val Sermon à Mordelles a été mené en 2013 par Laurent Aubry (Inrap). Considérant les résultats de cette opération, l'Etat (service régional de l'Archéologie - Drac Bretagne) a décidé de prescrire une fouille sur une surface de 4 hectares.
Photo 5 : Dans cette tranchée, les archéologues signalent la présence des vestiges avec de la bombe orange. L'ensemble des vestiges repérés à l'occasion du diagnostic sont dessinés puis consignés dans un rapport permettant d'évaluer le potentiel archéologique du site.
Photo 6 : Au cours du diagnostic sur le site du val Sermon, les archéologues de l'Inrap ont mis au jour des tuiles de l'époque gallo-romaine témoignant d'une occupation du site dès l'Antiquité.

La fouille préventive

En 2014, le travail de fouille préventive des archéologues est supervisé par deux responsables scientifiques : Mélanie Levan pour la période antique et Françoise Le Boulanger pour le Moyen Âge. Sur le terrain, elles assurent la coordination des opérations menées par une équipe de 10 personnes en moyenne. Après la fouille, elles auront en charge la rédaction d'un rapport, véritable analyse et synthèse de l'ensemble des données, qui permettra ainsi de conserver la mémoire du site. Ce travail, qui se poursuit en laboratoires et centres de recherches, fait intervenir plusieurs spécialistes : des céramologues (étude des céramiques), des numismates (étude des monnaies) ainsi que des carpologues qui étudieront les graines prélevées pendant la fouille, ou encore des palynologues qui s'intéresseront aux pollens…

Fouilles INRAP à Sermon
Quelques-unes des traces anciennes découvertes lors des fouilles.

Au cours du premier mois de la fouille, les chercheurs de l’Inrap ont procédé au décapage de la terre végétale, retirée par deux pelles mécaniques. Sous plusieurs dizaines de centimètres de terre, les vestiges apparaissent. Les premiers résultats livrent un réseau de fossés et parcelles qui semblent indiquer que la trame a peu changé depuis les premiers siècles de notre ère. La continuité s'observe dans l'orientation des fossés, identique depuis l'Antiquité jusqu’aux périodes récentes (cadastres de 1823 et actuel).

Fouilles INRAP Sermon

photo ci-contre : four utilisé au cours des VIIe-VIIIe siècles ; ses parois sont rougies sur une bonne épaisseur en raison de la chaleur.
Il est étonnant de constater qu'après plusieurs siècles, les graines stockées par les paysans dans des silos enterrés, puissent être retrouvées et prélevées par les archéologues. Ainsi, en prélevant des sédiments sur les parois de silos ayant été mis au jour et en les tamisant, il est possible d’obtenir des poussières de graines. Leur étude peut livrer de précieuses informations sur la flore locale, les pratiques agricoles ou le niveau économique des habitants. Lors de notre visite du site, nous observons la découverte de l’un de ces silos ainsi que d’un foyer allongé au-dessus duquel étaient séchées les graines avant d’être stockées.

Fouilles INRAP à Sermon

Les archéologues utilisent divers outils pour leur recherche : la grosse pelle mécanique pour le décapage, la mini-pelle pour démarrer les sondages dans les fossés, la pelle, la pioche et la truelle pour finir les sondages et fouiller les fossés, les silos, les fours, les foyers ou encore les emplacements des poteaux des bâtiments, et bien sûr la petite spatule pour les objets très fragiles.

Le travail de l'archéologue peut, lors de certaines phases, ressembler à celui du terrassier.

C’est ainsi que, répartis un peu partout sur la zone à analyser, les archéologues, à genoux ou dans des tranchées, creusent méthodiquement pour révéler et observer les vestiges contenus dans le sous-sol.

Les découvertes

Du temps des Romains

Au fur et à mesure de leurs travaux, les archéologues mettent en évidence tout un réseau de chemins et fossés datant de l’époque gallo-romaine, plus précisément des Ier et IIe siècles de notre ère. L’un de ces chemins conduit vers les vestiges très arasés d’un fanum, temple antique situé dans une zone proche du lieu-dit Le Val.

Plan des fouilles de Sermon

Dans les années 1980, un premier temple a déjà été fouillé en amont de l’aménagement routier du "barreau", à l'extrémité de l'allée gallo-romaine. Cependant, tous deux, distants d’environ 500 mètres, sont de taille et de plan différents. Comme cela est toujours le cas, l’entrée du temple du secteur du Val se situe plein Est. L’édifice s’inscrit dans un espace sacré délimité par un fossé appelé péribole. A l’époque romaine, il est la demeure sacrée du dieu et seuls les prêtres y pénètrent, les rites cultuels ayant lieu à l'extérieur.

Fouilles INRAP à Sermon

Sous ce temple, des structures plus anciennes datant de la période gauloise (Ier siècle avant notre ère) sont découvertes, mettant au jour tout un ensemble de très belles fosses rondes dont la fonction reste encore indéterminée. Ce sanctuaire, tout comme celui situé de l’autre côté du barreau, fut abandonné au milieu du IIe siècle de notre ère. Le long d’un autre chemin, les archéologues révèlent l’existence d’un grand bâtiment d’une surface au sol de 144 m2. D'après les vestiges, il s’agit d’une grange antique composée au moins d’un étage, avec une architecture en terre et une toiture recouverte de tuiles. Les traces de nombreux poteaux en bois subsistent dans le sol. Cette grange est située dans la campagne et non à proximité de maisons ce qui laisse supposer que différents paysans viennent y stocker leurs récoltes pour le compte d’un gros propriétaire.

Fouilles INRAP à Sermon

Au début du Moyen Âge

Les gens réutilisent énormément de matériaux, notamment antiques (pierres, bois…) et de bâtiments. C'est le cas de la grange antique à laquelle un four est alors ajouté. La fonction donnée à ce bâtiment par ses nouveaux occupants est encore inconnue. Cela nous amène à la seconde période d’occupation du site, entre le VIe et la fin du IXe siècle. Certains chemins antiques sont conservés par les habitants de l’époque. De part et d’autre des chemins, des maisons occupées par plusieurs familles apparaissent. Les chercheurs de l’Inrap retrouvent les emplacements de poteaux dont la répartition au sol dessine des plans de bâtiments. Les armatures des constructions sont en bois et les toits recouverts de chaume.

Fouilles INRAP Sermon

Donnée intemporelle, la préoccupation première des paysans installés dans ce grand hameau est de nourrir leur famille et de prévoir ce qui est nécessaire aux semailles de l’année suivante. C’est ainsi qu’à proximité des maisons, figurent des silos et des structures de combustion.

Schéma de silo

Les silos servent au stockage des graines dans le sol. Ils représentent une source d’informations pour les archéologues car ils permettent d’enquêter sur les espèces cultivées, les pratiques agricoles et le niveau économique des habitants. Les structures de combustion sont diverses : fours pour la cuisson du pain, foyers pour la cuisine, tranchées-foyer pour sécher les grains avant stockage dans les silos. Très souvent placées à l’extérieur des maisons, par peur de l’incendie, elles sont reconnaissables à leurs parois rougies en raison de la chaleur et à leurs cendres. Les premières cheminées ne seraient apparues dans les maisons qu’au Xe siècle.

Les objets découverts

Céramiques antiques
Objets Moyen-âge

Les caractéristiques des objets mis au jour dans les structures archéologiques diffèrent suivant la période d’utilisation. Par exemple, les céramiques antiques sont colorées et recouvertes d’un engobe[4]. L'engobe leur donne un aspect brillant, très recherché à l’époque antique. Elles servent principalement au service de la table (assiettes, écuelles, gobelets, plats).

Au cours de la première moitié du Moyen Âge (VIe-IXe siècle), la vaisselle de table en céramique est remplacée par des objets en bois. Les objets en céramique, quant à eux, sont surtout destinés au stockage des denrées et des liquides, ainsi qu’au feu pour y cuire les aliments.

A l’issue de cette fouille, l’exploitation des données scientifiques se poursuit au centre de recherche archéologique de Cesson-Sévigné. Cette phase permet d’analyser et d’affiner l’interprétation des éléments recueillis sur le site, puis conduit à la rédaction d’un rapport final, base d’une publication scientifique destinée au public.

L'inauguration d'un fanum gallo-romain

Fanum Sermon

En 1986 et 1987, les premières fouilles réalisées sur le site de Sermon, à l'extrémité de l'allée gallo-romaine, ont déjà révélé la présence d'un fanum (petit temple) unique en son genre en France en raison de sa partie centrale (ou cella) hexagonale. Celle-ci est généralement rectangulaire, voire ronde.
Les éléments découverts laissent supposer une utilisation de ce temple dès la première moitié du Ier siècle de notre ère.
En 2015, plusieurs bénévoles du Centre de recherches archéologiques du Pays de Rennes enlèvent la terre qui masque le temple pour le mettre au jour en vue de le valoriser. C'est ainsi que 1 500 pierres sont délicatement déblayées, puis balayées et grattées.
Ce fanum gallo-romain est inauguré en septembre 2015. Depuis, la cella de forme hexagonale apparaît clairement ainsi que le déambulatoire qui l'entoure. Cet espace sacré, la cella, était placé sous la protection d'une divinité que les fouilles n'ont pas identifiée. La galerie, qui fait le tour de la cella, pouvait servir à une déambulation des fidèles venant déposer des offrandes au dieu.
La municipalité de Mordelles a choisi de préserver les traces de ce temple gallo-romain pour les rendre visibles et accessibles au public.

Sources des photos

Photos obligeamment fournies par l'Inrap et prises notamment par H. Patier et L. Aubry. 
Photo fanum : R. Birot

Notes et références

  1. Institut national de recherches archéologiques préventives.
  2. Nous devons la réalisation de cet article à Mélanie Scellier, chargée du développement culturel et de la communication, Françoise Le Boulanger et Mélanie Levan, archéologues responsables d’opération. Toutes trois travaillent à l’Inrap et nous ont reçus sur le chantier afin de nous expliquer le cadre d’intervention des archéologues ainsi que l’intérêt de leur démarche.
  3. Service régional de l’archéologie.
  4. Fin revêtement à base d’argile délayée, de teinte orangée.
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